jeudi 10 décembre 2015

SUR LES TRACES DE PAUL ROBERT, LE LEXICOGRAPHE D'ORLEANSVILLE

SUR LES TRACES DE PAUL ROBERT

Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs !
Je tiens à remercier, ici, entre ces lignes, tout le staff de la faculté des langues de l’Université Hassiba Benbouali, de m’avoir permis de faire cette recherche sur cet homme illustre, qui est devenu le compagnon de tout homme de lettres et de sciences, car nécessaire et indispensable pour celui qui veut asseoir ses connaissances en matière de linguistique propre. Je les remercie encore, de m’avoir permis de vous faire cette communication, qui je l’espère, vous apportera clarté et connaissance sur la vie de cette homme illustre qui a fait don de sa vie à la recherche dans la linguistique au détriment, peut-être, et pour sûr de sa vie familiale.
Avant de parler de cet homme illustre, il me parait opportun de parler de sa famille et de sa ville pour le situer dans l’espace et le temps. D’abord, je parlerais de l’acquisition de son prénom qu’il obtint moins de six mois après la mort de son oncle Paul Robert, alors maire d’Orléansville et député à l’assemblée algérienne, mort à la suite d’un duel avec René Houbé, à Alger, le 13 avril 1910. (Je ne passerais pas sans rappeler qu’il passa la nuit de la veille de son duel dans l’hôtel des voyageurs à Orléansville et qu’il laissa dans la chambre qu’il avait occupée, une lettre dans laquelle il disait : « Si j’ai choisi le pistolet, dans le duel qui va m’opposer à René Houbé, c’est pour ne blesser personne » 
Lorsqu’il était à l’Assemblée Algérienne (député), il avait présenté un projet de Réforme Agraire qui ne fut pas pris en compte pour des raisons plus ou moins politicardes et racistes. Il avait dit que les arabes se donnaient le métayage avec un 1/5 (khemassat = métayage) alors, essayons de les intéresser encore plus en leur donnant la moitié ou le tiers, en leur fournissant le matériel nécessaire, et ce serait là une manière d’intégration de cette population dans notre vie politique et sociale et afin d’annihiler les différences et disparités existantes au sein des deux communautés.
Je ne vais point m’étaler sur le sujet et je vais entrer de plein pied dans le fond de la communication qui est la personne de Paul Robert, le lexicographe.

1910: Naissance de Paul Robert 
Paul Robert naît le 19 octobre 1910 à Orléansville, en Algérie. Il prit le prénom de son oncle Paul Robert mort à la suite d’un duel à Alger en Avril 1910. Ses grands-parents y étaient déjà installés depuis 1849, mais ils étaient originaires du Dauphiné, d'Auvergne, d'Anjou, d'Acadie, du Béarn et de Lorraine.
Son père, Joseph,  était Président des Assemblées algériennes jusqu'en 1945. Il était également minotier et propriétaire de plantations d'orangers; c'est lui qui a développé l'entreprise familiale.

Paul Robert, le tout «petit dernier» heureux et entouré d'une famille nombreuse, fréquentera l'école communale. Il aimait le football et la lecture. En été, toute la famille partait pour la France, dans les Hautes-Alpes au «Pavillon» d’été.
1919-1927: Enfance et scolarité 
Paul Robert a fait ses études secondaires au Lycée Mustapha d'Alger, à l'Ecole des Roches, en France et au Grand Lycée d'Alger.
Dès son enfance, Paul Robert possédait la prescience et une persévérance hors du commun. Dans son journal intime, écrit à l'âge de 17 ans, il nous livre les réflexions suivantes: «Lorsque l'on place toutes ses forces dans la réalisation d'un but, il est presque impossible qu'on ne l'atteigne pas»ou encore: «Je ne me laisse abattre par aucun accident, déprimer par aucun ennui, annihiler par aucune inquiétude.»
1930-1935: Etudes universitaires 
En 1930 Paul Robert s’inscrit à la faculté de droit d'Alger. Il participe activement à toutes les activités universitaires. Il est alors nommé rédacteur en chef d'Alger-Etudiants. Il y publie régulièrement ses articles. En se référant à ses articles dans Alger-Etudiants, il disait : «...Cet excellent apprentissage me permet de mesurer une fois de plus la pauvreté de mon vocabulaire et les difficultés de l'art d'écrire. Je ne cherche pourtant à m'exprimer qu'en style simple et clair.»
1931: Président de l'A.G. des étudiants, Paul Robert prend son rôle très au sérieux et rêve de faire aboutir le projet d'une maison des étudiants, qu'il réalisera.
Au cours de l’année 1932, deux drames bouleversent sa vie de famille : la mort de sa mère puis deux semaines plus tard, celle de sa sœur aînée.
Il puise sa vitalité et son courage dans un sursaut surprenant et participe au congrès de l'UNEF à Nice en tant que commissaire général de l'Union Nationale pour l'Afrique du Nord. Au mois de mai, il accompagne son père aux Etats-Unis et au Canada pour une mission d'étude sur les problèmes d'hydraulique agricole.
De son premier mariage en 1933, nait son fils Philippe en 1936.
Dès lors, installé à Paris, il passe ses diplômes en Droit public, en Economie politique et en Droit romain. Il s'inscrit à la faculté et choisit d'abandonner le barreau pour préparer l'agrégation de droit et un doctorat.
1936-1944: Années de guerre 
En 1936, pour son service militaire, Paul Robert est affecté au Ministère de la guerre et peut ainsi s'inscrire à l'Institut des Sciences Politiques. En même temps, il cherche un sujet de thèse.
En 1939 il poursuit ses études à Sciences Po   et obtient un diplôme en juin. Il rédige, par la suite, un petit ouvrage sur l'autarcie: «La politique d'isolement économique», qu’il publie la même année aux éditions Domat-Montchrestien.
Lors du début de la 2ème guerre mondiale, il fut rappelé et mobilisé pour exécuter le rôle de «chiffreur».
En 1941 Paul Robert s'installe à Alger, dans une villa à Hydra.
Il est remobilisé au Q.G. du Général Giraud, toujours au Service du Chiffre.
1944: il est rédacteur de presse de la Direction Générale des Etudes et Recherches (D.G.E.R.) à Paris.
1945-1950: Mise en œuvre 
En 1945, libéré de ses obligations militaire et fort financièrement de l'héritage de sa mère, Paul Robert peut mettre un point final à sa thèse qu’il soutient à la faculté de droit de Paris, «Les agrumes dans le monde». Il put acquérir une librairie au Quartier Latin et projette alors de reprendre ses études en vue de l'agrégation d'économie politique. C'est là que prend forme le projet de dictionnaire.
Laissons à Paul Robert lui-même le soin de nous confier ce qu'il attend d'un dictionnaire:
. Ainsi, il citait volontiers l'exemple suivant: «Qui connaît, à moins d'être un spécialiste, les mots «halieutique» et «onychophagie», alors qu'il serait si facile de les retrouver ou de les découvrir, le premier à l'article pêche, le second à l'article ongle?»
D’après Paul Robert : «la source principale des associations d'idées réside dans la définition des mots. Partant de cette idée élémentaire, je m'aperçois qu'il suffirait de dépouiller les dictionnaires de a à z et de procéder à des transferts de mots ou d'expressions d'article en article pour aboutir finalement à un aide-mémoire pratique, fort utile pour quelqu'un qui veut user de mots justes dans l'expression de sa pensée.»
Vers la fin de l’année 1950, mu par la force de sa conviction personnelle, il réussit à réunir un certain nombre de souscripteurs qui seront les futurs actionnaires de son entreprise : des amis d'abord, ainsi que les membres de sa famille, sur laquelle il pouvait toujours  compter. Il bénéficiera également du précieux soutien de ses premiers collaborateurs, qui, de par leur enthousiasme, lui resteront toujours fidèles et le conforteront dans ses convictions, pour la réussite de cette grandiose entreprise.

1951-1954: Consolidation de son entreprise 
En 1951, sentant son héritage s’épuiser, Paul Robert repart en Algérie afin de réunir les fonds nécessaires pour poursuivre son entreprise. Il réussit, avec l'aide d'amis, à créer sa maison d'édition: «La Société du Nouveau Littré». le siège social de celle-ci fut la ville de Casablanca au Maroc. Des milliers de souscriptions lui arriveront de toute l'Afrique du Nord.
Il lancera un concours par annonce dans Le Monde et Le Figaro, par le biais duquel il recrute son premier rédacteur, Alain Rey, (Alain Rey est un linguiste et lexicographe français né à Pont-du-Château le 30 août 1928. Il est le rédacteur en chef des publications des éditions Le Robert.
Alain Rey est un observateur de l'évolution de la langue française. Il incarne, à l'instar du Robert, une langue française moderne [1], n'hésitant pas à inclure dans ses dictionnaires du verlan ou des régionalismes[2].)
qui possède des références assez éclectiques parmi lesquelles le diplôme de l'Institut des Sciences Politiques, le titre de licencié ès lettres et trois certificats supplémentaires, dont un en histoire de l'art.
Alain Rey, jeune recrue, avoue à son patron qu’il n'a jamais ouvert le Littré. Les fiches de documentation établies par Paul Robert étaient là pour le guider et pour lui montrer que, loin d'avoir la science infuse, Paul Robert lui-même se référait aux auteurs le plus autorisés dans leurs domaines respectifs. La taille de la tâche qui les attendait était tel le rocher de Sisyphe pour un apprenti lexicographe !
En 1953, il accueille Josette Debove (Josette Rey-Debove, née le 16 novembre 1929 à Calais (Pas-de-Calais) et morte le 22 février 2005 au Sénégal à l'âge de 75 ans, est une lexicographe et sémiologue française, épouse et collègue d'Alain Rey aux éditions Robert. Elle fut la première femme lexicographe en France) qui quitte l'enseignement après six mois de carrière. L'apprentissage de cette collaboratrice commença pour durer une quinzaine de jours seulement pour saisir l’importance et la portée de leur œuvre.
Elle était très consciencieuse et très posée. Elle rédigeait moins rapidement qu'Alain Rey, mais ses rédactions étaient fort peu contestées à la révision.
Le 15 octobre 1953, le premier tome du GRAND ROBERT est publié.
Henri Cottez (Dictionnaire Des Structures Du Vocabulaire Savant - Éléments Et Modèles De Formation)ancien élève de l'Ecole Normale Supérieure et professeur au Lycée Condorcet de Paris arrive en juillet 1954, au sein de l’équipe. Il ne cacha point sa surprise devant la multitude et la  richesse de la documentation qu’il y trouva. Il émit le vœu que son apprentissage auprès de Paul puisse durer plus longtemps afin de cerner toute la mécanique de la rédaction avant d’entamer son nouveau rôle de rédacteur.
En 1954, la société compte déjà dix mille souscripteurs, mais devra augmenter son capital afin de faire face aux nouvelles dépenses.
Michel Lejeune, directeur du CNRS (LEJEUNE MICHEL (1907-2000)
Le linguiste Michel Lejeune est né en 1907 ; il est le frère du dessinateur Jean Effel (F.L., François Lejeune). D'une remarquable précocité (ses premiers articles datent de 1929), il a reçu sa formation dans la période féconde de l'entre-deux-guerres. Il fut en particulier l'élève d'Antoine Meillet, le maître de la grammaire comparée des langues indo-européennes, et de Joseph Vendryes, l'un des pionniers de l'étude de la langue gauloise. Michel Lejeune a enseigné la philologie grecque et latine aux universités de Poitiers et de Bordeaux, puis à la Sorbonne ; il fut, à partir de 1947, directeur d'études pour la grammaire comparée des langues indo-européennes à l'École pratiques des hautes études ; son Précis d'accentuation grecque, constamment réédité depuis 1945, permet d'apprécier ses qualités pédagogiques.
Son œuvre scientifique (vingt livres, plus de trois cents articles) frappe par son ampleur et par la diversité de ses champs de recherche : il s'est intéressé à presque toutes les la linguistique)lors d’un discours a formulé les propos suivants au sujet de l'entreprise de Paul Robert:
«Nous avons entendu il y a un moment, de la bouche de M. Robert, le récit d'une expérience individuelle qui a réussi. Elle a réussi parce que l'auteur, sachant ce qu'il voulait et le voulant fermement, ne s'est pas contenté d'être auteur et chef d'équipe, mais s'est fait lui-même éditeur, assumant au départ de gros risques, récompensé ensuite par des concours importants, dus à la fois à son activité, à ses relations, à l'intérêt que suscitait l'ouvrage.»

1955-1958: Retour à Paris 
La société « La société du nouveau Littré » fut délocalisée et Toute l’équipe du Maroc fut transférée à Paris. Plusieurs nouveaux collaborateurs sont recrutés. La création d'une société de distribution se fit sentir et elle fut créée sous le sigle, la S.A.F.O.R (société administrative des œuvres de Paul Robert).
En 1956 Paul Robert rencontre à Avranches le cousin d'Emile Littré, Hervé le Hanneur, qui le considère en tant que disciple de son illustre cousin.
Les problèmes ont toujours été abordés avec calme et compréhension par Paul Robert. N'écrit-il pas lui-même: «Si le récit de ces aventures peut porter quelque leçon, c'est que la foi profonde dans l'accomplissement d'une longue tâche donne à celui qu'elle anime la force de surmonter tous les obstacles.».
Comme une fourmi, patiemment, il accumule les efforts, persévère dans ses intuitions et réalise un vrai «...travail de bénédictin», selon les termes de Jules Romains dans un article paru dans l'Aurore en novembre 1957.
Il bénéficiera du soutien providentiel de Robert Le Bidois, grammairien (La syntaxe du français moderne (1936-1938), alors réviseur à la Division linguistique de l'ONU à New-York, qui rejoindra l’équipe parisienne en 1957 après une franche collaboration à distance.
En 1958 Paul Robert obtient un prêt à faible intérêt du Comité de la Caisse des Lettres du Ministère de l'Éducation Nationale. Ce fut la première aide financière que son entreprise obtint de l'Etat. Au mois de mars, la Fondation Simca lui attribue l'un des cinq prix de la «Route du succès». Son père s'éteint au mois d'octobre 1957. Il est enseveli à Orléansville, accompagné par des centaines de musulmans venus se joindre aux Européens malgré la guerre d'Algérie.
1959-1963: Reconnaissances 
Alain Rey est élu au Conseil d'administration et nommé secrétaire général de la rédaction.
Le 28 décembre 1959 Paul Robert est nommé Chevalier de la Légion d'honneur.
En 1962, il rencontre Wanda Duda Ostrowska, d'origine polonaise, de père déporté, mort pour la France. Elle deviendra sa seconde épouse ainsi qu'une collaboratrice discrète. Elle fut pour lui une aide et un soutien précieux.
1964: Achèvement, promotion et félicitations 
Le 30 juin 1964 au «Pavillon des Princes», à Boulogne, tout le personnel - équipe de rédaction, service commercial et administratif - est réuni pour fêter l'achèvement du dernier tome du Dictionnaire.
Paul Robert participe également au Séminaire roman de l'Université d'Heidelberg. «Le 6 novembre 1964 marque une date importante dans ma vie de conférencier. C'était, en effet, la première fois que j'allais affronter un vaste auditoire d'étudiants étrangers pour leur parler de mon dictionnaire.»
En décembre, il donna une conférence à l'Université de Liège sur les Problèmes et méthodes de la lexicographie française.
C'est à cette époque que la mise en route du Petit Robert commença.
Enfin, du continent africain afflueront d'autres souscriptions qui permettront la réalisation du projet du Grand Robert et sa finalisation.
Le dimanche 28 juin 1964, Paul Robert écrit: «Je suis depuis le matin dans un état de surexcitation fébrile, lorsque vers sept heures du soir, j'atteins enfin l'article ZYMOTIQUE. D'une écriture précipitée, je jette sur une grande feuille de papier la phrase suivante: «Aujourd'hui, 28 juin 1964, j'ai terminé mon dictionnaire.» Je retrouverai, le lendemain, cette feuille couverte de signatures de tous mes collaborateurs sous ce simple compliment: «Bravo, patron!»
Mais le travail n'en est pas fini pour autant!
«Dans les semaines qui suivent l'achèvement du dictionnaire, j'ai l'impression de sortir d'une interminable maladie. Pourtant, de nouvelles tâches m'appellent et d'abord le Petit Robertalphabétique et analogique dont j'élabore le programme et les méthodes avant le retour de mes collaborateurs en septembre.»
Paul Robert attache une importance primordiale au Petit comme au   Grand Robert, parce qu'il pressent que le meilleur moyen d'assurer la publication du Petit Robert est de faire la promotion du Grand Robert.
En effet, la vision de Paul Robert dépasse bien les frontières et il disait en 1964 «Je pense, que le Petit Robert servira bien la cause de la langue française à l'étranger aussi bien qu'en France.»
Paul Robert assumera désormais le rôle d'ambassadeur, de conférencier et de propagandiste, même contre l'avis de son entourage, en plus de son rôle de Chef d’équipe et de Rédacteur. Il parcourra ainsi des millions de kilomètres, notamment en Europe, en accordant des interviews, en faisant des émissions de radio et de télévision, ou en donnant des conférences.
1965-1968: Consécration 
Le 10 février 1965, Paul Robert fut l’invité   de Pierre Desgraupes dans son émission : «Lecture pour tous». Il donna plusieurs conférences en Belgique et aux Pays-Bas, en Suisse et en Allemagne.
La célébration de l'achèvement du dictionnaire eut lieu Le 25 mars 1965 au cercle militaire. Ce jour-là, plus de cinq cents personnes viennent féliciter Paul Robert et son équipe.
Paul Robert participe également au XIe Congrès de Linguistique et de Philologie Romanes à Madrid, à la Biennale de la langue française à Namur, et à la Foire internationale du livre à Francfort, à la conférence à Gand au centre Royal artistique et littéraire.
A Bruxelles, F. Bauer, Berlinois d'origine, Chef des bureaux de la traduction de l'Euratom, présentait ainsi son œuvre: «Paul Robert a fait une œuvre fort utile pour ses compatriotes. Mais ce qu'il ne sait peut-être pas et que je tiens à lui dire devant vous, c'est qu'il n'existe au monde aucun ouvrage semblable au sien et que sa méthode de dictionnaire alphabétique et analogique est une découverte de portée universelle.»
Paul Robert part pour une tournée de conférences au Canada en mai 1966 où Il rencontre le président de la corporation des traducteurs professionnels du Québec, Marcel Paré, et participe à plusieurs émissions de Radio-Canada. Le 20 octobre, le Robert reçoit la médaille d'or du jury du «Prix du plus beau livre sur alfa», pour sa nouvelle présentation.
Naissance de Jérôme, son petit-fils en 1967.
En mai 1967, le Club de la grammaire de Genève décerne le Prix Vaugelas à «l'auteur qui a le mieux travaillé à la défense de la langue française».
En novembre 1967, Paul Robert retrouve Marcel Paré et envisage la rédaction de dictionnaires bilingues à partir du Petit Robert.
Naissance de Dominique, sa petite-fille.
En avril 1968, Paul Robert accompagne Alain et Josette Rey au XIIe Congrès de Linguistique et de Philologie Romanes à Bucarest où ils doivent présenter des communications.
Une nouvelle tournée de conférences est programmée à la fin de l'année 1968 en Suisse romande.
1969-1971: Poursuite de son oeuvre 
Il installe sa résidence dans l'ancien presbytère d'Armeau dans l'Yonne, à quelques kilomètres de la maison de Pierre Larousse.
Le Supplément du Grand Robert est édité en 1970.
Sur l'invitation du Ministre de la Culture et de la Société Tunisienne de Diffusion, Paul Robert se rend à des conférences en Tunisie au mois de mai 1970.
Au mois d'août 1970, il se rend au XIIIe Congrès de Linguistique à Québec, à l'Université de Laval où Paul Robert retrouve ses amis canadiens et des universitaires de différents pays. Parmi eux, deux professeurs de l'Université d'Edimbourg qui s'intéressent vivement à son projet de dictionnaire franco-anglais et lui proposent de le mettre en contact avec l'éditeur Collins de Glasgow.
Il se rend en Norvège au mois d'octobre pour une conférence.
En décembre 1971, il est l'invité de Jacques Chancel pour son émission «Radioscopie».
1972-1979: Les honneurs 
Mars 1972, le roi Baudouin le reçoit comme invité d’honneur.
Au cours de la même année, Paul Robert donnera naissance à l'association ROBERT & COLLINS pour l'élaboration du dictionnaire bilingue français-anglais.
1973, Paul Robert part en voyage à Dakar (Sénégal) où il est reçu par Léopold Sédar Senghor, qui lui remet les insignes de Commandeur de l'Ordre du Lion. (Haute distinction)
Après le Conseil international de la langue française à Grenoble en 1974, il part à Nice pour le Festival du livre et le Congrès international des traducteurs et interprètes où il reçoit une ovation à la suite de laquelle, il déclara : «Il m'était ainsi donné de constater que les professionnels de la traduction comptent parmi les plus fervents supporters du Robert».
En 1974, son dernier petit-fils, Jean-Paul, vient au monde.
Paul Robert est nommé Officier de l'Ordre de Léopold par le roi Baudouin en 1975. Une année plus tard, il reçoit les insignes de Commandeur des Arts et des Lettres.
1980: Décès de Paul Robert 
Paul Robert décède le 11 août 1980 à Mougins; il repose désormais au cimetière de Bois-de-Vaux à Lausanne 



Je voudrais rappeler ici, à la mémoire de Paul Robert, une citation de Paul Valéry qui disait :

« Les grands hommes meurent deux fois : une fois comme homme, et une fois comme grand ».
[ Paul Valéry ]
Extrait de Cahier B

1980: Hommages 
Inauguration deux ans après le décès de Paul Robert, le 6 novembre 1981 à Mougins d'une avenue à son nom.
Discours de Monsieur Bernard Clavel, 6 novembre 1981
Écrivain né le 29 mai 1923 à
Lons-le-Saunier
Langue d'écriture Français
Genre(s) romans, sagas,
livres pour la jeunesse
Distinctions Prix Goncourt en 1968 Œuvres principales
Pirates du RhôneMalataverneLe Seigneur du fleuve
Quand j’étais capitaineLa Révolte à deux sous
Cargo pour l'enferLes Roses de VerdunLe Carcajou
Le Soleil des mortsLe Cavalier du Baïkal
BrutusLa Retraite aux flambeauxLa Table du roi
Les Grands Malheurs
Œuvres 1
Œuvres 2 - La Grande Patience
Œuvres 5 - Le Royaume du Nord

Compléments
  Engagement dans la Résistance
  Membre d'associations de non-violence :
La Coordination française pour la Décennie
Non-violence XXI
  Un de ses différents lecteurs a dit de lui :
« Sa simplicité, son courage et surtout sa grandeur d’âme ont fait de lui mon écrivain fétiche ».
Un autre lecteur a dit de lui :
« six histoires de chiens. De Kouglof, chien de guerre en passant par la chienne Tempête, Clavel nous fait sourire, nous révolter, nous émouvoir et bien sûr, aimer
« Si l'on vient à se demander la raison de ma présence ici aujourd'hui, je n'en pourrai donner qu'une: l'amitié.
Elle suffit. Elle peut tout justifier.
Car enfin, tous les écrivains de notre époque ont puisé à la même source, tous pourraient se trouver là au même titre que moi, pour remercier Paul Robert. Peut-être lui dois-je davantage que mes confrères parce que, d'entre tous le plus ignorant, c'est à moi qu'il a le plus donné.
Il est exceptionnel qu'un homme étant mort depuis moins de deux ans, l'on puisse déjà célébrer sa mémoire avec la certitude absolue qu'il demeurera. Si nous en sommes à ce point persuadé, c'est que, de son vivant, Paul Robert était un monument.
Beaucoup mieux qu'une statue, le plus grand, le plus beau, le plus solide des monuments parce que le plus humble : un nom commun. Il est des gens qui dépensent une fortune pour acheter une particule, d'autres qui luttent avec acharnement pour conquérir une majuscule, Paul Robert a travaillé toute sa vie pour perdre son prénom et sa majuscule.
Mais, quelle plus belle particule qu'un article? Quoi de plus étonnant que cet homme qui devient le Robert, puis un dictionnaire, puis le dictionnaire?
Etre un objet pareil au plumier, au crayon ou au stylo dans le cartable de l'écolier, sur la table de l'écrivain ou le bureau du ministre, que peut-on rêver de plus exaltant? Etre l'indispensable compagnon!
Un jour, Paul Robert quittera les colonnes du Robert des noms propres pour gagner celle du Petit Robert où il se sentira beaucoup plus à son aise. On ne verra plus son visage, mais un livre; et j'imagine une définition ainsi rédigée: Robert, dictionnaire parfait de la langue française. On dit par exemple d'un bon dictionnaire: c'est un vrai Robert.
Paul Robert n'avait conservé de son patrimoine africain qu'une modeste statuette et le portrait de sa mère. Tout ce que possédait sa famille avait été détruit dans le tremblement de terre d'Orléansville.
C'était fort émouvant, de voir cet homme si sensible, si plein de ferveur, qui, ne possédant plus de son passé que sa propre mémoire, s'attelait à créer un monde. Un monde tellement vaste qu'il lui arrivait non point de s'y égarer, mais d'être obligé tout de même d'y chercher son chemin.
Car Paul Robert était le premier à se servir du Robert. »
Mais, à le définir ainsi, on en viendrait vite à le présenter comme un chercheur enfermé dans les livres. Prisonnier de son œuvre, pareil à une feuille qu'on laisse se dessécher entre les pages.
Non. Je l'ai connu assez et j'ai assez fréquenté ceux qui l'entouraient pour savoir qu'il était un être d'une extrême sensibilité, attentif à l'autre. Penché sur les cœurs avec des gestes et des regards où perçait sa délicatesse.
Sans doute les deuils jalonnant sa jeunesse dorée l'avaient-ils marqué profondément.
« L'ébène des nuits et le feu des étoiles sont des couleurs de grande noblesse. Je vois assez bien les armoiries de Paul Robert gravées en lettres d'or sur un beau chagrin noir ». 
On ne saurait mieux vêtir le souvenir d'un tel homme, qu'en le reliant à la manière du livre le plus précieux qui soit. Le plus nécessaire à nos travaux, à nos échanges.
Lorsque Paul Robert étudiait, son président de thèse lui reprochait de négliger l'aspect théorique au profit du pratique; son père, quant à lui, le trouvait beaucoup trop théoricien.
Nous savons, pour avoir si souvent fréquenté son œuvre, qu'il n'était ni trop l'un, ni trop l'autre. Il n'était jamais ni trop ni pas assez. Il avait su réaliser le parfait équilibre. Il était la connaissance jamais déshumanisée et c'est bien l'essentiel.
Il voulait que le savoir demeurât humain et servît l'homme. À Anatole France observant que les nations se déchirent parfois pour les mots que des individus ont mal entendus, il répondait en forgeant un vocabulaire d'une rigoureuse précision. Ciselant l'outil de notre langage, il contribue à l'édification de la paix.
« Parce qu'il était déjà entré vivant parmi les vrais immortels, parce qu'il était sur ma table, en permanence, pour répondre à toutes mes questions, j'avais, sans m'en rendre compte, identifié l'homme à l'œuvre, les croyant tous deux installés dans la vie pour l'éternité ».
Le jour où la voix brisée de Wanda Robert est arrivée de Mougins pour m'annoncer: «C'est fini», quelque chose s'est déchirée soudain comme si le temps eut froissé dans sa main un univers de vie, et de mots, et d'amour.
Ayant raccroché l'appareil de téléphone, je suis resté longtemps à fixer sur ma table ce compagnon de travail que son auteur m'avait offert. Il ne restait plus de tant d'efforts que ce livre achevé et l'écho d'une voix de femme répétant: c'est fini.
Paul Robert savait mieux que personne le poids des mots. Avait-il pensé à ce que celui-là pouvait détruire en tombant ainsi au beau milieu d'un après-midi?
« Quelques mois seulement avant que l'on ne m'annonce qu'il allait nous quitter, Josette Pratte, écrivaine (Les honorables) (femme de Bernard Clavel), qui brossait un portrait de lui pour un grand journal féminin, le voyait comme une sorte de poète égaré ».
Josette Pratte est née à Québec en août 1951. À dix ans, elle perd sa mère, dont elle a brossé un portrait émouvant dans son premier roman : Et je pleure. ...
Elle est l'auteur des romans « Et je pleure (1981) », « Les Persiennes (1991) », « Les Honorables (1994) ». ...
Les citations de Josette Pratte
«Le meilleur moyen de garder un homme, c'est de le faire souffrir.»
[ ] - Extrait d’ Et je pleure 


«La femme abandonnée doit se contenter d'exister.»
[ ] - Les Persiennes
J'ai sursauté en lisant ce mot, et puis, contemplant sous ce nouvel éclairage le visage de cet homme au regard tout empreint d'une infinie tendresse, j'ai commencé de penser que l'intuition féminine avait sans doute deviné juste.
Je l'ai vraiment compris le jour de notre dernière rencontre, alors que le mal qui allait l'emporter pesait déjà sur lui et broyait son souffle.
« Adossé à une œuvre fabuleuse, cet être redevenu faible se blottissait dans l'ombre du Grand Robert empilé derrière lui, pareil à une montagne de savoir, de besogne, de joie et de douleur ».
Enveloppé d'amour par sa compagne, comme il était fragile, ce jour-là, le Petit Robert!
Dans son regard si plein de confiance, luisait déjà le reflet de ces astres transparents, que cherchent toute leur vie à saisir de leurs mains, ces éternels enfants que sont les poètes égarés. Ceux qui savent découvrir au fond des mots, la chaleur de la vie et le parfum du rêve.
Bernard Clavel, 6 novembre 1981
  Inauguration en mars 1994 du Lycée Polyvalent Paul Robert aux Lilas (seine-St-Denis).
Se battre... Clavel l'a fait toute sa vie. Une vie vouée à écrire, une vie arrachée à un destin qui l'avait promis à autre chose. Fils d'un boulanger de Lons-le-Saulnier, fils d'un père qui «n'avait jamais lu un livre», il commence par peindre. «Mais un jour le décor ne m'a plus suffi.» Ce Rhône qui l'entoure, ce fleuve qu'il avait tenté d'emprisonner sur la toile, il va le laisser couler sur la page blanche. «J'ai longtemps vécu sans écrire. Mais quand ça m'a empoigné, ça ne m'a plus lâché.»

Lauréat du prix Goncourt en 1968 pour "les Fruits de l'hiver", il est élu à cette académie trois ans plus tard, avant d'en démissionner en 1977.

Il a refusé à plusieurs reprises La Légion d’Honneur et s’est tenu à l’écart de Paris bien qu’il soit membre de l’Académie Goncourt.

                                                  Mohamed Boudia - Ecrivain

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire