NOTRE
RANDONNEE A THALASSA
Avant de prendre le départ, nous avions constaté
qu’il nous manquait une cassette vidéo pour la caméra numérique. La ville était
presque morte. Presque tous les magasins étaient fermés. On se croirait dans un
« no mans land ». On aurait parié que le temps s’était arrêté à
Chlef. Les rares cafés qui avaient timidement ouvert leurs rideaux se comptent
sur le bout des doigts. Il fallait attendre l’ouverture des magasins qui
vendaient des cassettes vidéo. Nous nous sommes résignés à attendre car nous ne
pouvions partir sans cassette et sans pouvoir filmer sur les lieux de notre
tâche car l’image est le premier support de notre randonnée qui nous
permettrait d’illustrer notre beau livre. D’un commun accord avec Amari, notre
caméraman, nous avions décidé de tuer le temps, malgré nous, dans un café où
nous avions pris des cafés au lait et des croissants. Il est sept heures
quarante-cinq du matin. Nous pris la voiture et nous avions fait un tour dans
la ville pour dénicher un photographe matinal. Par chance, on en a trouvé un.
Nous avions acheté la cassette vidéo et nous avions décidé de partir au plus
vite, afin de ne pas perdre plus de temps. Lorsque nous primes la route vers le
Nord en suivant la nationale n°19 menant de Chlef à Ténès, la circulation
devenait de plus en plus dense. C’était normal, c’était l’heure de pointe. Tous
les fonctionnaires commençaient à se hâter et les commerçants ouvraient dans un
vacarme presque monotone leurs rideaux de fer dans un roulement fracassant.
C’était devenu une habitude, aucun commerçant n’ouvrait avant neuf heures car
la majorité d’entre eux n’habitaient point le centre ville. L’on constate de
prime abord que la ville était devenue un grand centre commercial ou plutôt un
bazar.
Nous roulions à une allure
modérée. En sortant de la Ferme, actuellement Hay El Houria, située juste après
le pont d’Oued Chéliff, nous sommes tombés directement sur le tronçon
d’autoroute menant vers la localité de
Chettia, chef-lieu de commune du même nom. L’air était frais et nous roulions à
une allure presque randonnière. Nous
discutions de tout et de rien mais notre idée fixe, c’est la tâche que nous
nous sommes fixés pour l’écriture d’un beau livre illustré relatant toutes les
données concernant les 35 communes de la wilaya de Chlef. C’est sur proposition
de l’union locale des écrivains que Monsieur le Wali de Chlef nous a chargés de
cette tâche combien astreignante mais combien utile pour l’histoire de notre pays en général et en particulier pour notre
wilaya. Nous nous sommes fixés pour but la visite de toutes les communes de la
wilaya. Monsieur le wali a avisé,
par lettre circulaire, tous les chefs de
Daïra et tous les présidents d’APC de la wilaya, afin de nous prêter main forte
et de nous faciliter la tâche qui s’annonçait vraiment ardue et fastidieuse.
Monsieur Mohamed BOUDIA, chercheur, historien et écrivain s'est porté volontaire pour accomplir cette mission
historique et culturelle qui doit amener
un plus à l’histoire de la wilaya de Chlef. Ils s'est adjoint les services d’un cameraman professionnel,
Amari, qui doit les suivre partout et prendre les photos sur les lieux même de
la commune. Nous avions traversé la localité de Chettia qui commençait à
s’animer et nous roulions sur l’autoroute jusqu’à l’entrée de la Daïra d’Ouled
Farès qui est aussi le chef-lieu de la Commune du même nom. A la limite du
tronçon d’autoroute qui nous a mené de Chlef à Chettia, puis à Ouled Farès, nous
remarquons une station d’essence à l’entrée du village sur notre gauche et sur
notre droite, un édifice public, en l’occurrence un collège d’enseignement
moyen. Des bâtiments à perte de vue sont en construction tout le long du
tronçon d’autoroute menant de Chettia à Ouled Farès. Ces nouvelles
constructions devraient remplacer, d’après certains ex-responsables de la
Wilaya, les chalets préfabriqués érigés au lendemain du séisme du 10 Octobre
1980.
Nous avons traversé le village sans nous arrêter. Il
était presque 8 heures trente. Nous avions passé le petit pont à l’extrémité
Nord du village. Le cimetière des « Chouhadas » se dressait là, à
l’horizon, témoin des sacrifices faits par les valeureux enfants de l’Algérie.
Après avoir dépassé le cimetière, juste après un long virage, une petite
bourgade, ou plutôt un petit ilot de maisons traditionnelles se dressait là en
face de la fontaine d’eau minérale « Aïn Bouchakor » qui ne désemplit
pas de toute la journée, de gens venus se ravitailler en eau « potable ».
Il faut dire que l’eau distribuée à Chlef et ses environs par l’algérienne des
eaux est imbuvable même avec la redevance demandée aux clients pour la qualité
de l’eau qui n’existe nullement.
Nous continuions notre route et nous tombons sur un
lieu-dit Afghane avant d’arriver à Cinq Palmiers (où il y avait un camp de
concentration durant la guerre d’Algérie qu’on nommait « Camp
Beaufils » situé dans une ferme coloniale du même nom et qui servait de
lieu de séquestration et de torture occupé par les barbouzes de la DST
(Direction de la Sécurité du Territoire).
Un peu en amont du village et sur la droite, nous pouvons remarquer le mausolée
de « Sidi Maâmar ».
Quelques kilomètres plus loin,
nous apercevons un barrage de gendarmerie fixe à la sortie du village
« La gare des Heumis ». Sur la droite, une bifurcation qui mène vers
la commune de Bénaïria. Pour notre part, nous continuions tout droit pour
atteindre, quelques kilomètres plus loin, la daïra de Bouzeghaïa. Des locaux commerciaux ont été construits à l’entrée
Sud du village ainsi qu’une unité de la protection civile et un commissariat.
Des HLM y ont été aussi érigés pour recaser
les fonctionnaires qui pourraient venir d’autres contrées pour les
besoins de la sécurité du village. Nous avons traversé le village de
Bouzeghaïa, de part en part, du Sud au Nord, pour commencer notre ascension des
premiers contreforts des monts du Dahra. La route commençait à monter en
lacets, par moments très étroits. A la limite du lieudit « la plâtrière
des Heumis », la route devient plus ou moins rectiligne et nous apercevons
déjà les premières maisons du douar « Kherba ». En dépassant le
douar, dont les constructions se trouvent majoritairement sur le côté gauche de
la chaussée, nous entamons la descente vers les plaines du littoral ténésien.
Quelques lacets nous obligent à ralentir notre vitesse de croisière. Au bout de
quelques minutes de trajet, nous débouchons sur le carrefour Sidi Akkacha –
Abou El Hassan, où il y un poste de gendarmerie fixe afin d’assurer la sécurité
du citoyen. Nous tournons sur la gauche pour nous engouffrer directement dans
la route menant à Kaloul, Abou-El-Hassan, Aghbal et dernier ressort Thalassa et Tazghoult.
Sur la route menant à Kaloul et Abou-El-Hassan, des
eucalyptus centenaires cernent la route de part et d’autre, en forme d’allée
ombragée mais qui commence à laisser les rayons cuisants du soleil d’été car
les arbres qui meurent ou qui sont à la fin de leur vie ne sont pas remplacés
pour pérenniser cette voûte ombragée qui faisait la fierté des habitants de la
région, il y a quelques dizaines d’années seulement.
Nous dépassons Kaloul sans nous arrêter et nous
continuions notre route en direction d’Abou-El-Hassan. De loin, on remarquait
une agitation inhabituelle et un brouhaha qui nous arrivait en sourdine, puis
s’amplifiant au fur et à mesure que l’on se rapprochait de l’entrée Est du
village. C’était le Dimanche, jour de marché hebdomadaire à Abou-El-Hassan.
C’était l’occasion rêvée pour filmer et prendre des photographies pour notre livre.
Nous nous présentâmes au brigadier du poste de la Gendarmerie Nationale qui
nous accompagna jusqu’au Souk et nous avions pris de très beaux clichés et une
vidéo souvenir pour les générations futures.
L’entrée du village et du Souk hebdomadaire d’Abou-El-Hassan
Le souk hebdomadaire d’Abou-El-Hassan (côté
vêtements)
Le souk hebdomadaire d’Abou-El-Hassan (côté meubles
et literies)
Souk hebdomadaire d’Abou-El-Hassan (côté chaussures,
literie, tapisserie)
Nous avions pris plusieurs photos et vidéos du souk
puis nous avions pris congé de notre hôte (le brigadier de la gendarmerie) pour
nous engouffrer dans la rue principale
du village d’Abou-El-Hassan. Le minaret, hautain d’une nouvelle mosquée, à
l’entrée Est du village vous rappelle à un certain recueillement et vous
enveloppe d’une aura religieuse qui vous va jusque dans vos veines et vous
interpelle pour votre salut devant le Créateur.
La grande mosquée d’Abou-El-Hassan
Nous remontons dans notre véhicule, après ces quelques clichés et nous
empruntons l’artère principale du village. Après avoir traversé le village
d’Abou-El-Hassan d’Est en Ouest, nous sortons de ce dernier pour commencer à
goûter les plaisirs de la nature, avec les prés verdoyants de part et d’autre
de la route qui nous mène vers Aghbal puis vers Thalassa.
Route
et prés à la sortie Ouest d’Abou-El-Hassan.
Sur notre route, nous avons eu le plaisir de constater la revivification
de notre cheptel par les troupeaux de moutons paissant paisiblement sur les
deux côtés de la voie.
Troupeau de moutons traversant la route.
Collines avoisinant le village d’Abou-El-Hassan
Nous entrons dans la commune de Thalassa et nous franchissons le
deuxième village important de la commune qui est Aghbal. Nous continuions notre
route et à peine quelques kilomètres insignifiants nous séparent du
village-mère qui est Thalassa. Nous nous présentons aux autorités locales et
Monsieur Rekkab Abdelkader, le Président de l’APC, s’est fait un devoir de nous
recevoir lui-même dans son bureau en nous souhaitant la bienvenue et en mettant
à notre disposition tous les moyens nécessaires et indispensables à notre
mission. Nous l’en remercions vivement.
Pressés par le temps, nous prenons congé de notre hôte et nous déposâmes
notre voiture particulière dans l’enceinte du parc communal pour emprunter la
voiture de service avec chauffeur qui devait nous amener de prime abord sur un
site où des vestiges très anciens s’y trouvaient. C’est à l’entrée Est du
village de Thalassa. Nous traversons à gué l’Oued Tazghoult qui est à sec en
cette période de prémices des grandes chaleurs. En revenant sur nos pas, en
direction d’Aghbal, nous remarquons une colline parsemée de blocs de pierre qui
ne vous disent rien vus de loin mais lorsqu’on s’y rapproche, nous constatons
un trésor en matière de vestiges.
Site archéologique à l’entrée Est de Thalassa.
Vestiges d’une construction ancienne (époque romaine)
Bassin
à eau avec couvercle
Bassin à eau taillé à même le roc sur le
site archéologique
Bassin
à eau avec sur le site archéologique de Thalassa
Groupe
de bassins à eau taillés dans le roc
Différentes
réserves à eau taillées dans la pierre
Différents
bassins à eau avec couvercle taillés dans le roc
Différents
bassins à eau taillés à même le roc
Réserve
d’eau taillée dans la pierre sur le site archéologique
Bassins
hydrautliques (Réserves d’eau) dans le site Sidi Aek
D’après la multitude de bassins à eau rencontrés sur le site
archéologique de Thalassa, on serait porté à croire qu’il y avait une
communauté de plusieurs habitants sur le territoire du site archéologique. Pour une première hypothèse, nous avions cru
que c’était des sortes de tombeaux pour sépultures anciennes, mais après
vérification et discussion avec les autochtones, il s’est avéré que ces bassins
étaient des réserves d’eau qui servaient de réserve aux habitants qui demeuraient
sur le site.
Il en existe des dizaines sur tout le site et l’on est supposé à croire
que c’était un cimetière mais, ne trouvant ni ossements ni sépultures, nous
sommes contraints à croire qu’effectivement c’était des petites retenues d’eau
de pluie qui servaient pour l’usage domestique.
Arbre :
Olivier millénaire se trouvant sur le site des vestiges
Lauriers roses dans la périphérie d’Aghbal Cne de Thalassa
Site
de verdure d’un oued à Aghbal
La
voûte de la porte d’entrée de la ferme à Thalassa
Vestiges
d’une huilerie romaine près de la ferme
Vestiges
d’une huilerie près de la ferme
Sur le site de la ferme se trouvant dans le village de Thalassa, nous
remarquons beaucoup de morceaux d’un puzzle qui pourrait être une ancienne huilerie
romaine. Les éléments éparpillés que nous avons photographiés nous montrent
bien que c’est des modules ayant appartenu à une presse ou plutôt un moulin à
olives.
Ces éléments sont parfois de forme ronde, d’autres fois de forme conique
ou plats ayant à leur centre un trou qui nous amène à penser que les éléments
pouvaient s’emboîter pour constituer une moulin ou un « écraseur
d’olives ».
« Guelmame
El Bakht » (l’étang de la chance ou du destin), retenue collinaire sur les
hauteurs de Thalassa
« Berket
El Hadh » et le panorama
environnant Certains l’appellent « Guelmame El Bakht » (Lac de la
chance)
C’est une retenue collinaire qui a été construite dans les années 2000
et qui sert actuellement à l’irrigation de certains champs maraîchers sur les
hauteurs de Thalassa.
Panorama
autour de la retenue d’eau « Guelmame El Bakht »
Elle
est située sur le flanc Est d’un pic de la chaîne du Dahra, de l’autre côté
d’Oued Erroumane. Nous ne savons pas si cette appellation vaut dire « la
rivière des grenades » ou bien « la rivière des romains ». Les
deux hypothèses sont plausibles.
La région de Thalassa est très riche en agriculture. Le paysage est
vraiment envoûtant de par la verdure et les maquis qui tapissent la région et
en font un lieu de villégiature qui pourrait amener beaucoup de touristes à la
région de Thalassa.
La forêt commence à reprendre et la verdure emplit toute la contrée et
vous invite à respirer un air frais et sain parfumé de thym sauvage et d’odeur
de pin.
Le calme qui y règne vous plonge dans une
certaine euphorie et vous emmène sur les chemins du songe et du repos bien
mérité avec une journée harassante dans la ville ou dans les champs.
C’est
un site à fructifier car la distance qui le sépare de la mer Tazghoult n’est
qu’à quelques kilomètres seulement.
Avec la retenue d’eau de « Berket El Hadh », les cultures
maraîchères foisonnent un peu partout aux abords de celle-ci. Les agriculteurs
s’en donnent à cœur joie et l’on remarque tout au long de notre périple des
fellahs travaillant dans les champs et suant pour donner un plus à leur région.
L’agriculture y est
prospère. Nous trouvons un peu de tout. Des champs de blé, de blé tendre,
d’orge, d’avoine ainsi que des petits jardins potagers à proximité de la
retenue d’eau. Bien que la retenue d’eau se trouve dans les tréfonds des
djebels, la sécurité y est totale, car plusieurs postes de gardes-champêtres y
sont installés et veillent à la sécurité des habitants. Mais quand arrive la
nuit, tous reviennent vers le village où ils sont entassés dans des
bidonvilles. A la faveur du programme présidentiel en matière d’auto
construction rurale, plusieurs familles ont déjà obtenu l’aide de 700.000
dinars mais malheureusement, l’assiette pour implanter les maisons n’existant
pas, les bénéficiaires attendent une aide des responsables au niveau de la
wilaya pour dégager une assiette pouvant servir à la construction d’une cité
pour ces bénéficiaires de l’auto construction.
La commune a bénéficié d’un programme très varié et les travaux
d’assainissement et de viabilisation battent leur plein.
La région est touristique et peut attirer beaucoup de rentrées
financières pour la commune qui se trouve seulement à quelques kilomètres de la
mer. Des colonies de vacances pourraient y être implantées et elles auront mer
et montagne en même temps.
Mohamed Boudia - Ecrivain - Auteur
Président du café littéraire de Chlef - Vice-président de l'Association Nationale Héritage Algérie -
Mohamed Boudia - Ecrivain - Auteur
Président du café littéraire de Chlef - Vice-président de l'Association Nationale Héritage Algérie -
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